Leçon
Emprunté au latin lectionem, accusatif de lectio « cueillette », « choix, élection, tri », « lecture, ce que l’on lit, texte ».
μάθημα (máthima). Du verbe μανθάνω, manthánô (« apprendre »), dérivé de la racine Μαθ Math « savoir ».
Le grec μανθάνω, manthanô donne le latin medito. Le dictionnaire Lewis et Short le rapproche du sanscrit madha (« sagesse »), du grec ancien μάθος, mathos, μανθάνω, manthanô, et μῆδος, mêdos (« pensée »), μήδομαι, mêdomai, → voir medeor et re-med-ium.
Lectio De lectus avec le suffixe -io.
1. Cueillette. 2. Lecture. 3. Choix.
Origines du mot.
Le terme leçon est emprunté vers 1135 au latin lectionem : la notion de lecture et le fait de lire sont concomitants du mot. En effet, leçon a alors le sens de « texte sacré », il est logique que leçon signifie « texte lu » dès son origine. Cependant, parallèlement à ce sens, se développe dès le XIIe siècle le sens de « ce qu'un élève doit apprendre », et, par métonymie, « l'enseignement que dispense le maître ». Un tel glissement de sens n'est pas étonnant lorsque l'on considère qu'à cette époque l'instruction des enfants ou des jeunes gens était en général assurée par les gens de l’Église.
lectus /lek.tus/
1 Participe passé de lego :
a - cueilli, recueilli, ramassé.
b - Choisi, de choix, d’élite.
Le lit
Lectus, de l’indo-européen commun *legʰ- (en) (« coucher ») qui a, entre autres, donné λέχος, lékhos (« lit ») en grec ancien. De l’indo-européen commun *legʰ- (en) [1] (« coucher ») qui a, entre autres, donné λέχος, lékhos (« lit ») en grec ancien
Aby Moritz Warburg (né le 13 juin 1866 à Hambourg, Allemagne, et mort également à Hambourg le 26 octobre 1929)
Il importe tout d’abord de mentionner l’aversion de Warburg pour l’organisation du savoir selon des disciplines et des époques strictement délimitées ; « des frontières policières ». Dans son essai sur Bachofen (1935), Walter Benjamin place Warburg au même niveau que Goethe et Bachhofen, invoquant « le mépris pour les limites établies entre les sciences ». Contrairement à Benjamin, qui ne choisit pas de travailler à l’extérieur de l’université, il semble que Warburg n’ait jamais prétendu à une fonction académique.
Le mythe En ce qui concerne Herman Usener lui-même – et son élève Warburg a abondé dans son sens à cet égard –, il s’agit plutôt d’une tendance aux explications universelles, qui s’attache aux mythes des origines et qui, cultivant une approche comparative entre les références antiques et ethnologiques, efface leurs différences. Parce que Warburg s’appuie dans ses textes sur la catégorie d’humanité, ainsi que sur les « grands processus de développement généraux » et qu’il décrit un système global de formes symboliques à l’aide d’une typologie des seuils de développement, cette tendance à l’universalisation fait figure de garde-fou qu’il doit opposer au dépassement des catégories propres aux disciplines et aux époques. Néanmoins, l’histoire de la culture menace à nouveau de se présenter comme une histoire naturelle en raison de cette tendance.
Le serpent, pour les Hopis, est à la fois un danger et un remède, un démon et messager, un intercesseur, qu’on laisse aller, après la cérémonie, vers les quatre points cardinaux pour que la pluie vienne, avec l’éclair. Mais cette ambivalence, comme le montre Warburg dans sa seconde partie, capitale, de sa conférence se retrouve dans l’image du serpent dans la culture grecque : si un serpent monstrueux étouffe Laocoon et ses fils lors de la guerre de Troie, c’est un serpent salvateur qui s’enroule autour du bâton d’Asclépios, le dieu de la guérison, l’Esculape des Romains ; la même ambivalence se retrouve dans la religion chrétienne avec le serpent tentateur et le serpent de Moïse. Il existerait ainsi un « paganisme éternel », indestructible, mais ambivalent, dont les images permettent à l’homme de faire face aux angoisses et aux interrogations qui viennent le hanter ; mais, en même temps, ce paganisme peut connaître de véritables métamorphoses, peut muer en quelque sorte, par un processus de symbolisation caractéristique de l’évolution humaine.
En 1918, au moment où le conflit mondial se résout avec la défaite de l'Allemagne, Warburg, en proie à de graves troubles mentaux s'éloigne de Hambourg et de la scène intellectuelle et reste reclus dans une clinique Suisse, à Kreuzlingen, où il sera soigné par le psychanalyste Ludwig Binswanger pendant de longues années ; en 1923, il demande à Binswanger l'autorisation de prononcer une conférence pour les patients et les médecins de la clinique, et revient dans cette conférence sur le voyage qu'il a fait vingt-sept ans plus tôt, et auquel, dans ses textes publiés du moins, il n'avait plus fait allusion depuis.
Or dans sa conférence, Warburg explique qu'il n'a jamais été malade, mais qu'il a toujours pensé comme un Indien. Les Indiens Hopis dont il avait visité les villages au sommet de la Black Mesa, dans le désert d'Arizona sont des communautés sédentaires, contemplatives, dont l'activité se partage entre la culture de la terre (la culture du maïs) et une activité symbolique qui consiste à convoquer les puissances de la nature par des actions rituelles. Dans le filigrane de sa conférence, Warburg suggère que le travail, son propre travail à l'intérieur de la bibliothèque qu'il avait créée à Hambourg, ressemble à celui des Hopis : un travail de récolte de textes et d'images qu'il s'agit de rassembler, de classer et de documenter ; mais aussi de mise en relation de ces documents. Il s'agit de produire des collisions entre les documents écrits et les images, afin de faire naître le sens.
Warburg déclarait : « je veux remplacer l'activité mélancolique du chercheur par une activité plus physique » ; Les déplacements de Warburg à l'intérieur de sa bibliothèque sont des déplacements physiques. Tous les chercheurs font d'ailleurs cette expérience, à mille lieux du dispositif qui consiste à penser la recherche comme une activité mélancolique et morbide et derrière la manière dont Warburg conçoit l'activité du chercheur, il y a évidemment l'ombre portée de Nietzsche et du Gai savoir. Ce renversement dans la manière de concevoir l'activité du chercheur, du lecteur a une conséquences : celui-ci ne se limite plus à interpréter les documents qu'il étudie, mais qu'il peut les transformer. La pensée de Warburg marque ainsi l'irruption de l'activisme, ce qui signifie que le chercheur ne se contente plus de dessiner des phénomènes historiques ou des configurations de savoirs et de les articuler : il les produit. C'est ainsi qu'en construisant une fiction théorique inouïe, Warburg utilisera son expérience indienne non seulement comme une grille d'interprétation de la Renaissance italienne, mais comme une voie d'accès à sa reproduction, utilisant le déplacement dans l'espace comme une métaphore de l'anamnèse.
Warburg dit en 1923 « j'étais sincèrement dégoûté de l'histoire de l'art esthétisante ».
Dans le premier texte qu'il publie en 1893, consacré à Botticelli, Warburg pose la question de la manière dont les artistes de la Renaissance ont représenté le mouvement. L'apparition de la « forme serpentine » l'expression est dans le texte d'Alberti, est le symptôme du fait que les artistes se sont intéressés à la représentation du mouvement. Warburg retrouve cette forme dans le traitement de l'enveloppe extérieure des figures, la chevelures et les voiles soulevés par le vent... Selon Warburg, l'apparition de la forme serpentine exprime la volonté des artistes d'abolir la limite entre les images et les corps animés.
En 1923, lorsque Warburg rentre à Hambourg, dans la nouvelle bibliothèque qu'il fait construire à côté de la maison familiale, il stipule que la salle de lecture devra être construite en ovale - comme un rappel de la configuration du cosmos dans la pensée pré-moderne, mais aussi comme la place des villages hopis : la salle de lecture est conçue comme une arène, au-dessus de laquelle s'élève un balcon, depuis lequel les auditeurs assistaient aux conférences.
Quand on voit le dossier médical de Warburg qui a été en partie publié dans un volume intitulé La guérison infinie, on comprend que ça ne va pas du tout ! C'est l'élaboration intellectuelle qui lui permet d'échapper à la maladie, et non l'inverse. Je ne pense pas qu'on puisse dire que la maladie est un passage vers l'autre. Au contraire : c'est plutôt le fait de surmonter la maladie qui lui a donné accès à l'autre absolu auquel il donne le nom de l'indianité.
Dans la parabole construite par Nietzsche, le serpent pénètre dans la bouche du berger, et Zarathoustra passe au moment où celui-ci se convulse avec ce lourd serpent noir qui s'est glissé entre ses lèvres. Zarathoustra l'encourage à mordre la tête du serpent, et le berger se relève transfiguré. Warburg avait conçu sa bibliothèque comme une sorte de corps organique, d'image objective de sa pensée. Warburg était une figure menaçante pour sa propre discipline... En cela aussi, il est nietzschéen : il détruit l'histoire de l'art comme Nietzsche la philosophie.
Mythe et langage ;
Au début du phèdre, Platon rapporte comment Socrate est conduit devant les portes de la ville, sur la rive de l’Illisos par Phèdres qu’il a rencontré. Platon a dépeint jusque dans ses moindres détails le paysage dans lequel il a transposé cette scène, et ce tableau a un éclat et un parfum dont les descriptions de la nature des anciens donne peu d’exemples. C’est dans ce paysage que Phèdre demande si ce n’est pas là le lieu où, d’après le mythe, Borée s’est emparé de Orithye, car l’eau est agréablement pure et transparente. Mais à la question suivante posée à Socrate de savoir s’il tient ce récit, ce mythème pour vrai celui-ci répond ; quand bien même il n’y croyait pas, il n’en serait pas troublé. « Car je subtiliserais comme les sages, je dirais que Borèe, le vent du Nord précipita Orithye du haut des rochers voisins où elle jouait avec Phamacèe, et qu’étant morte dans cette chute, elle passa pour avoir été enlevée par Borée » est à savoir la théorie. Mais moi je trouve ces explications intéressantes, cependant elle est si elles exigent trop d’ingéniosité.
Tout ce que nous appelons mythe est conditionné et médiatisé par le langage : en ce sens que le mythe est en rapport avec un manque fondamental du langage, avec une de ses faiblesses originales. Toute désignation linguistique est nécessairement équivoque et c’est dans cette équivocité, dans cette parodie de mots qu’il faut chercher la source et l’origine de tous les mythes.
Que l’on pense, par exemple, à la fable de Deucalion et de Pyrrha, qui, après qu’ils sont sauvés par Zeus du grand déluge qui a anéanti l’humanité, deviennent les aïeuls d’une nouvelle espèce en jetant derrière eux des pierres qui se transforment en homme. Cette genèse de l’homme à partir de la pierre est proprement inintelligible et semble défier toute interprétation – mais ne s’éclaire pas aussitôt si l’on se rappelle qu’en grec homme et pierre sont désignés par des termes identiques ou semblables du point de vue phonétique. Que les mots aloi et laas sont consonants. Ou alors qu’on prenne le mythe de Daphné, qui, poursuivie par Apollon, est sauvée par sa mère, la terre, laquelle la transformant en lauriers. De nouveau ce n’est que l’histoire du langage qui peut rendre ce mythe intelligible et lui arracher un sens. Qui était Daphné ? Pour répondre à cette question, nous devons recourir à l’étymologie ; en d’autres termes, il nous faut étudier l’histoire du mot. Daphné peut être rapportée au sanskrit à Ahana et Ahana signifie le rougeoiement de l’aurore. Dès que nous savons cela, tout s’éclaire. L’histoire de Phébus et de Daphné n’est rien d’autre que la description de ce que l’on peut voir tous les jours, d’abord l’apparition du rougeoiement de l’aurore dans le ciel oriental, ensuite le lever du dieu solaire, qui se presse derrière sa fiancée, puis le pâlissement progressif de la claire rougeur du matin au contact des chauds rayons du soleil et finalement sa mort ou sa disparition dans le sein de sa mère, la terre.
Le facteur décisif pour la formation du mythe ne fut donc pas le phénomène naturel lui-même, mais bien plutôt le fait que le mot grec symbolisant le laurier — Daphné — et le mot sanskrit symbolisant la rougeur de l’aube, sont liées et conduisent à identifier nécessairement les figures qu’ils désignent. D’où ; la mythologie est inévitable, elle est une nécessité inhérente au langage, si nous reconnaissons dans le langage la forme extérieure de la pensée : elle est, en un mot, l’ombre obscure que le langage jette sur la pensée et qui ne disparaîtra jamais, aussi longtemps que langage et pensée ne coïncideront pas entièrement, ce qui ne pourra jamais être le cas. Il ne fait aucun doute qu’il existe une mythologie de nos jours comme autant d’Homère, mais nous ne la remarquons pas parce que nous vivons dans son ombre, et parce que nous reculons tous, et éblouis à la pleine lumière de midi de la vérité. La mythologie au sens le plus pur du terme est le pouvoir que le langage exerce sur la pensée dans toutes les sphères possibles de l’activité spirituelle.
Le langage ne peut commencer ni par un stade de simples concepts nominaux ni dans celui de simples concepts verbaux et que c’est lui seul qui produit cette scission entre les deux, qui crée la grande crise de l’esprit au cours de laquelle la permanence s’oppose au changement, l’être au devenir. C’est pourquoi il faut concevoir les concepts originels du langage, dans la mesure où il peut être question d’eux, de telle sorte qu’il se situe non pas en deçà, mais au-delà de cette séparation, de telle sorte que soit donné en eus des figures qui se tiennent en quelque sorte en équilibre entre la sphère nominale et la sphère verbale, entre l’expression des choses et celle des processus et des activités dans un état particulier d’indifférence.
La philosophie en tant que telle ne peut dépasser ce point ; elle ne peut prétendre représenter in concreto le grand processus de séparation qui s’accomplit ici et déterminer rigoureusement les unes par rapport aux autres ses phases singulières. Mais, si elle doit se contenter quant à elle d’une détermination théorique générale des contours de l’image de ce développement, la linguistique et l’étude des mythes pourront peut être complétée de leur côté ses contours et saisir avec plus de rigueur les lignes que l’examen philosophique et spéculative ne peut qu’indiquer.