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Freud.jpgFonction sociale et thérapeutique du café philo.
Lorsque pour la première fois j’ai posé fesses et oreilles dans un café philo, très franchement, je me suis demandé ce que je faisais là. Etais-je dans un nouveau type de secte ou obscure association ? Quel était l’enjeu de ces paroles, libres à priori, véhiculant tout de même nombre d’idées fausses, voire de grosses bêtises, mais aussi à même de culbuter quelques lieux communs et d’alimenter, d’enrichir, une réflexion personnelle dont la nécessité est parfois masquée par un esprit consumériste induit par notre environnement social.
Très vite je me suis formulé ce que je savais déjà, que la culture, la réflexion, si tant est qu’elle soit nécessaire, est une affaire personnelle qui passe plutôt par la lecture que par des échanges bistrotiers, si élevés soient-ils. Pourtant, tout aussi rapidement, de la même manière que la plupart d’entre nous, je devins accro à ces réunions dont le but apparent, fort bien décrit et avec talent par Georges Nonnenmacher dans son article « A quoi servent les cafés philo » était donc celui d’un enrichissement personnel grâce à de véritables échanges, l’écoute de l’autre, et peut-être un certain esprit militant voulant que le partage du savoir, quel qu’il soit, pourrait éventuellement nous sortir du monde absurde dans lequel nous vivons, au moins pour un temps, deux heures par semaine.
Cependant, d’y aller voir de plus près, que l’on considère le café philo au travers de sa fonction humaniste, comme un sport, ou comme un moyen de trouver un sens à sa vie, cela ne suffit pas à expliquer ce rendez-vous hebdomadaire si important où nous subissons aussi la bêtise ordinaire, à commencer par la nôtre. Nous connaissons tous des gens très intelligents, cultivés, brillants, dont la présence manque ici, qui négligent nos assemblées au motif qu’elle ne font pas avancer grand chose, qu’il s’agit juste d’une masturbation pseudo intellectuelle et qu’ils ont autre chose à faire que d’écouter ce qui ressemble souvent à des élucubrations sans intérêt. Objectivement, ils n’ont pas tout à fait tort, même s’il arrive qu’émerge parfois une pensée forte et originale. Alors pourquoi attachons nous tant d’importance, que chacun relativisera à sa manière, à ce rendez-vous ?

Tout d’abord, puisque le support de nos échanges est dit philosophique, ce qui n’est pas toujours flagrant, quelle qu’en soit la qualité, il me semble devoir expliquer pourquoi j’introduis le sujet en utilisant la première personne, le terme introduire n’étant pas innocent puisqu’il s’agit de chercher l’un des fondements de notre acharnement plus ou moins philosophique. Donc, que l’on s’abrite derrière Spinoza, Bourdieu ou Lacan, cela montre, outre l’évidente imbrication des différentes sciences humaines, toujours complémentaires pour un même sujet, que derrière ces pensées fortes propres à nos choix culturels, nous optons pour ce qui nous en est compréhensible, et qui par opportunité nous a conduit à assumer ce processus de défenses psychiques qu’est l’intellectualisation. Ceci n’étant, bien entendu, pas synonyme de qualité. Ainsi, lorsque tel ou tel nous explique sa vision du monde grâce à un concept élaboré par Machin, c’est bien évidemment de lui-même qu’il parle, jusque dans ce qu’il affirme comme une anti-thèse décrite par Bidule. Le choix parmi les grandes pensées étant suffisamment large, il nous suffit d’un peu de persévérance pour y reconnaître la nôtre bien formulée. C’est cela la culture. Comme le dit Pierre Rey, « la culture c’est la mémoire de l’intelligence de l’autre ».
En bref, nous sommes ici dans ce que la philosophie a de plus pur : plier le réel à nos nécessités. C’est pour cela que j’aborde le sujet en force en utilisant la première personne. Ici, quel qu’en soit l’alibi culturel, nous parlons tous et avant tout de nous mêmes, de nos buts, de nos aspirations. Heureusement, ledit alibi qu’il soit philosophique, sociologique, psychanalytique ou mystique, nous permet de rendre notre discours à peu près entendable, voire intéressant et d’une certaine façon universel. C’est-à-dire que chacun peut y trouver matière, non seulement à formuler, mais surtout reformuler sa propre pensée, de la faire entendre et ainsi d’en avoir un retour susceptible d’un effet miroir regardable. En bref, parler de soi par l’intermédiaire de Nietzsche, de Bouddha, du petit Jésus ou de Freud, ou de ce que l’on en a compris, peut modifier le regard que nous portons sur nous-mêmes au travers d’une formulation que ces grands autres ont rendu entendable.
En fait, nous nous faisons entendre et aussi écoutons, grâce à des concepts plus ou moins pointus que nous parvenons ou tentons de reformuler avec cette chose personnelle qu’est notre sensibilité. Derrière Platon, Socrate ou Dugenou, se dissimule un je qu’il nous est si difficile de faire entendre, de reconnaître, mais aussi de tenter cette chose impossible consistant à combler ce trou, cet inconnu à jamais qui existe chez l’autre. Si d’aucun perçoive de ce dernier propos une forme triviale, nous entrons de plain-pied, si j’ose dire, dans la fonction sociale du café philo, celle de la rencontre, de ce besoin de créer du lien, ou dans un élan militant, altruiste, autre forme de défense psychique, d’aider l’autre à exister en donnant une place à sa parole, bien qu’elle soit parfois difficile à entendre.
Enfin, concernant ceux qui consacrent l’essentiel de leur temps libre à l’étude et la compréhension de nos grands penseurs, afin de peut-être eux mêmes produire une pensée originale, voire du concept, qui je le rappelle n’est ni plus ni moins qu’une production artistique, c’est-à-dire un truc qui ne sert à rien, et comme le dit Deleuze à peu près, « un concept, si mince soit-il, n’a de valeur que signé ». À savoir qu’il s’agit d’une œuvre n’ayant pour fonction que celle de partager son propre émoi avec l’autre. Nous sommes donc dans cet encore processus de défense psychique propre à tous les artistes : la sublimation. Reste l’humour, dernier mode de défense nous concernant aussi qui, comme chacun sait, est la politesse du désespoir.
Voilà ce qu’en Dit Sophie de Mijola-Mellor, psychanalyste de son état : « l’humour se produit aux frais des affects négatifs, dépit, colère, et même angoisse de sa propre mort. Il leur emprunte leur énergie et la convertit en un affect opposé, source de plaisir grâce à un développement qui inhibe l’évolution de la douleur et porte l’investissement sur un autre point. Le processus ressemble à une sublimation ». En deux mots, la sublimation, du moins telle qu’elle est considérée en psychanalyse, consiste à détourner une pulsion d’un but inatteignable vers un autre plus accessible : la philosophie par exemple, plutôt que de trucider son père et tout ça parce qu’il couche avec maman. Mieux vaut effectivement prendre cela avec philosophie.

Il est temps à présent de lâcher le gros mot et se poser cette question : la café philo est-il un lieu facteur de résilience ? Et pour quoi faire ?
Nous venons de passer en revue les 4 principaux modes de défense psychique qui permettent de parcourir ce chemin sans fin qu’est celui de la résilience : l’altruisme, l’intellectualisation, l’humour et la sublimation. Or, ces quatre modes et peut-être en premier l’intellectualisation sont tous ici présents, à divers degrés selon chacun. D’autres, tels que le déni, le refoulement, le clivage, etc…, s’ils sont considérés comme adaptatifs, mais non résilients, semblent être ici combattus puisque comme le dit Georges Nonnenmacher à juste titre « le café philo est à la fois lieu ludique et convivial où s’élabore une réflexion critique et constructive dans une parole éprise de justesse. Bref, lieu d’une résistance douce à la régression obscurantiste et à toutes les violences de notre époque », sauf peut être, cet autre processus de défense non résilient, la "projection" qui consiste-en une opération par laquelle le sujet expulse de soi et localise dans l’autre des qualités, des sentiments, des désirs, qu’il méconnaît ou refuse en lui. Ainsi, l’animisme, le mysticisme, sont-ils la projection sur un Grand Autre de ce que l’on peut ou n’ose trouver en soi, c’est-à-dire la capacité de se confronter au réel et pas seulement de regarder ses manques dans une réalité qu’il nous est si difficile de construire, de symboliser. De la même manière, comme nous en avions convenu dans un débat précédent, le philosophe est un séducteur, donc, désireux d’assumer cette projection où l’autre lui reconnaît des qualités ne relevant à priori que d’une projection fantasmatique. Ainsi, pourrait-on dire que le philosophe, sinon pour lui même, peut se révéler un dangereux agent anti-résilient Toutefois, je n’irai pas jusque-là, car justement ici, le parfois philosophe occupe à priori la même place que tout un chacun, même s’il déborde un peu.

Nous sommes avant tout dans un lieu de parole, pertinente si possible, dont l’alibi, noble s’il en est, est la philosophie. Au passage, d’introduire un peu de psychanalyse ou de sociologie dans ce bourbier philosophique ne peut qu’enrichir ladite parole. Donc, d’aller faire un tour du côté de la sociologie, j’ai relevé dans l’ouvrage de Jacques Diament, que beaucoup connaisse, publié chez l’Harmattan, et dont quelques exemplaires sont encore disponibles, intitulé « les cafés de philosophies », j’ai relevé ces quelques phrases qui me semble aller dans le sens de ce que j’essaie de démontrer, que le café philo est aussi un lieu où chacun cherche à résoudre une problématique personnelle. Un espace thérapeutique en somme. Il constate, concernant l’objet des débats, « plus le sujet (du débat donc) peut concerner chacun à titre personnel, plus il recueille de suffrages. Mais seulement 19% dans notre enquête admettent qu’ils espèrent trouver dans les cafés philo une solution à leurs problèmes car force est de constater à travers leurs propos que beaucoup ont manifestement des problèmes ».
Ce que nous dit Jacques Diament est qu’il transpire de sa rigoureuse enquête sociologique cet impérieux besoin qu’a la majorité des participants de trouver un sens à sa vie et non de chercher une quelconque vérité concernant le monde dans lequel nous vivons. D’enfoncer ce clou de la philosophie en tant qu’alibi à nos préoccupations existentielles, il remarque que, pour la plupart d’entre nous, nos connaissances philosophiques n’augmentent pas dans le temps, malgré une fréquentation assidue de nos débats. Cependant, et bien entendu, apprenons nous ici à mieux décrypter tant notre réalité psychique que sociale. Le café philo est un lieu où l’on progresse, où l’on grandit, grâce à l’écoute, mais aussi et peut être surtout grâce à une parole, à une pensée, à des représentations que l’on doit apprendre à socialiser, à rendre entendables, par l’autre et par nous mêmes. Or, justement, d’entrer en résilience consiste exactement en cela. De là à penser que le café philo est aussi un espace thérapeutique, il n’y a qu’un pas. Je dis « aussi » parce que l’on ne peut, évidemment le réduire à ça, mais de s’interroger sur cette fonction masquée derrière son noble et indéniable but culturel. Ainsi de re-citer Georges Nonnenmacher « toute pensée devrait se doubler d’une pensée de la pensée ». Je nous propose donc d’aller voir derrière ces idées que nous serions là simplement pour l’objet philosophique, ou pour trouver un sens à notre vie, des valeurs en somme, ou tout simplement créer du lien social grâce à un support intellectuel et humaniste à la mesure de nos exigences relationnelles.
Cependant, de relier café philo et résilience suppose d’examiner ledit concept et de voir s’il peut y avoir corrélation.

Tout d’abord, les fameux processus de défense psychique déjà évoqués que le résilient doit mettre en œuvre, dont je ne re-citerai que l’intellectualisation, dans laquelle nous baignons me semble-il. De toute manière, ces défenses, quelles qu’elles soient, ne sont opérantes que dans l’usage souple et adaptatif que l’on en fait. Or d’apprendre à écouter l’autre, d’entendre sa parole, d’être tolérant à son endroit, comme nous devons le faire ici, va justement à l’encontre d’une psychorigidité susceptible de rendre inefficaces nos modes de défenses.
D’autre part, dans leur thèse ; Stevens et Sybil Wolin retiennent 7 caractéristiques qui seraient présentes, à des degrés divers, dans le fonctionnement résilient, et, j’ajouterai nécessaires à l’existence de nos débats.  D’abord
- la perspicacité, bien entendu au premier plan de nos assemblées, à des degrés divers, donc,
- l’indépendance, or chacun n’est ici porteur que d’une parole qu’il revendique pour lui même. Ainsi pourrait-on supposer que nous soyons tous farouchement indépendants, ou du moins que nous cherchions à tendre vers,
-l’aptitude aux relations, que de fait, soit nous avons, soit qu’il nous faut développer si l’on désire être entendu,
-l’initiative, or d’être ici est déjà pas mal,
-la créativité, ce à quoi nous nous obligeons pour produire un discours original,
-l’humour, parfois un peu absent, mais nous ne sommes à priori pas là pour rigoler, quoi que,
-et enfin, la moralité. Or, s’il y a bien un lieu où s’expriment de grandes valeurs morales, frisant même parfois la rigidité, c’est bien ici.
Pour finir, j’insisterai sur ce point, que la résilience consiste à trouver un tuteur qui nous permettra de modifier des représentations néfastes concernant notre propre histoire, celle qu’évidemment nous racontons ici. Celui ci peut être la philosophie, ou toute personne, et présentement nous avons le choix, susceptible de nous renvoyer une lecture acceptable de ce que nous nous efforçons de symboliser concernant une problématique qu’il nous est bien difficile de digérer seul et qui nous gâche plus ou moins la vie.
En fait, la question serait, sommes-nous ici, avec tant d’assiduité, pour aussi parler de nous, et dans quel but ? Considérant alors la fonction sociale du café philo, beaucoup, selon l’étude de Jacques Diament, pourrait simplement répondre, afin de créer du lien, de ne plus être seul, de donner sens à nos vies, d’y réfléchir ou, tout bonnement, d’être un peu moins bête. Dans tous les cas, il s’agit de guérir quelque chose.
Pour ma part, s’agissant ce soir d’être honnête avec nous mêmes, si je regarde les sujets que j’ai exposés cette année, l’ivresse, l’amour, les idées fausses, thérapie et philosophie donc, force m’est de constater que tous sont au cœur de ma problématique et que je trouve au travers de vous, ne serait-ce que partiellement, d’accord ou non, cet effet-retour qui j’espère me permet d’avancer.
De la même manière, quand tel ou tel nous assène ses convictions en sachant pertinemment qu’elles ne seront pas partagées, quel est le sens de cette perte de temps, sinon de se les affirmer à soi même et ainsi les consolider ou, pourquoi pas, les ébranler un peu plus si nécessaire, plaisir ultime, me semble-il, du café philo.

En guise de conclusion, j’oserai ce trait d’humour désespérant, sinon désespéré, que nous sommes ici pour être ébranlés par l’autre et que c’est bien agréable. Ceci, évidemment, afin de redonner une place convenable à nos petits ou gros tracas. Or c’est justement cela la résilience, pallier à une trop forte excitation, psychique en l’occurrence, disons difficilement élaborable, grâce à ce que Cyrulnik, s’inspirant de Winnicott, appellerait de « bonnes » rencontres, et ce n’est pas honteux !

Merci.

Gilles GUILLEMARD.
Fonction sociale et  thérapeutique du café-philo  (café-philo du 13 juin 2007)
« Nous avons une très douce médecine que la philosophie ; car des autres, on en sent le plaisir qu’après la guérison, celle-ci guérit et plaît ensemble. »    
Montaigne

En France, le café a toujours eu une fonction de lien social en tant que lieu de rencontre informel autour d’un verre. D’ailleurs, l’effondrement récent du nombre de cafés en France a coïncidé avec le délitement du lien social dans notre société, ce qui n’est pas le fruit du hasard. L’invention du café-philo par Marc Sautet en 1992 a aussi contribué à relancer cette fonction de lien social du café qui était en train de se perdre. Si cette fonction sociale du café-philo semble évidente, il n’en est pas de même pour sa fonction thérapeutique…
L’idée que la philosophie soit thérapeutique ne devrait guère nous surprendre, dans la mesure où les grecs, « inventeurs » de la philosophie, la considéraient comme une médecine de l’âme pour reprendre la belle expression de Socrate. Dans son excellent ouvrage Qu’est-ce que la philosophie antique ? Pierre Hadot nous rappelle à quel point les grecs assimilaient la philosophie à une thérapeutique, refusant toute  séparation entre la théorie et la pratique. Pour les grecs, la philosophie était véritablement une manière de vivre engageant tout notre être, l’adhésion à une école philosophique étant comparable à une forme de conversion spirituelle.
Cette dimension thérapeutique a été provisoirement écartée par le triomphe en Occident de la philosophie universitaire marquée par l’avènement de l’hégélianisme. C’est d’une part la philosophie existentialiste, initiée par Kierkegaard et d’autre part la philosophie tragique, martelée par Nietzsche qui vont faire renaître l’idée d’une dimension thérapeutique de la philosophie. Alors que la philosophie « sauvera » Kierkegaard de son désespoir, Nietzsche fera du philosophe le médecin de la civilisation, tout en reprochant au socratisme d’être un analgésique contre la douleur. C’est d’ailleurs assis à sa terrasse de café de Copenhague que Kierkegaard trouvera l’essentiel de son inspiration philosophique. Et son disciple existentialiste Sartre écrira une partie de ses œuvres dans le célèbre bistrot du Flore !  Sartre avec sa psychanalyse existentielle et Foucauld avec son souci de soi  confirmeront ce retour au moins partiel à l’idéal philosophique grec.
Convaincu par cette dimension thérapeutique de la philosophie, il nous reste à en révéler le contenu. La philosophie  nous soigne fondamentalement de notre désespoir lié à l’absence de Sens. En donnant un sens même provisoire à ce que nous vivons, la philosophie apaise quelque peu notre sentiment de l’absurde. Même si elle n’apporte pas forcément de réponse satisfaisante à nos questions les plus lancinantes, elle permet au moins de distinguer les vrais problèmes des faux, ce qui est déjà beaucoup.  De manière plus triviale, la philosophie nous soigne de la banalité du quotidien en nous faisant découvrir des pans inédits du réel. La philosophie a la faculté béatifiante de transfigurer la réalité pour la rendre plus intéressante qu’elle ne paraît au sens commun. Aristote et Platon voyaient en la capacité de s’étonner et de s’émerveiller l’essence même de la philosophie, ce en quoi le philosophe est un naïf au sens noble du terme. Or, c’est la perte d’une telle capacité d’étonnement qui est aujourd’hui la cause principale du mal de vivre, un mal qui se caractérise par la saturation du désir.   
Jean-Luc  Berlet  
Tag(s) : #Textes des cafés-philo

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