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La séduction est-elle un piège?
« La séduction suprême n’est pas d'exprimer ses sentiments, c'est de les faire soupçonner. » Barbey d’Aurevilly.
L'étymologie du mot séduction renvoie au latin seducere qui signifie conduire hors du chemin, dévoyer, ce qui situe la séduction du cote de l'immoralité, voire de la perversion. C'est d'ailleurs ce sens qui sera retenu jusqu'à l'époque classique, Dom Juan étant pour l'Eglise une figure sulfureuse vouée à I'enfer.  ..Notre culture marquée par Ie christianisme a érigé Dom Juan en archétype du séducteur qui piège ses victimes féminines en leur faisant espérer une liaison durable. Et moi-même dans mon livre Le complexe de Dieu, je fais de Dom Juan une figure de l'orgueil humain et plus spécifiquement masculin. À travers l'art de la séduction, Don Juan recherche davantage la domination sur l'âme de la femme conquise que sa possession charnelle. Certains experts du donjuanisme ont même affirme que Dom Juan n'avait pas besoin d'avoir de rapports sexuels pour jouir de ses conquêtes, séducteur simple sentiment de son pouvoir amoureux lui suffisant. En outre, Don Juan aimait séduire des religieuses dans un esprit de défi a l' encontre de Dieu, ce qui illustre bien la dimension métaphysique de sa quête. II n'y a rien de tel chez Casanova, l'autre grande figure de la séduction, ce dernier recherchant Ie maximum de relations sexuelles possibles avec les plus jolies femmes possibles. Casanova est un obsède sexuel, mais pas Don Juan qui est plutôt obsédé par séducteur pouvoir. Mais, dans les deux cas, la séduction constitue un piège redoutable tendu par l'homme séduisant à la femme assoiffée d'amour, car cette dernière est trompée dans son espoir légitime d'une relation s'inscrivant dans la durée. Si la séduction est un piège pour la personne séduite, il arrive que Ie séducteur soit lui-même pris à son propre piège. Et Ie fait de tomber amoureux ne constitue-t-il pas Ie plus beau des pièges auquel s'expose tout séducteur et toute séductrice? Le philosophe danois Kierkegaard constitue l'exemple patent du séducteur piège par l'amour. C'est lors de son stade esthétique quand il rédige son Journal du séducteur que Kierkegaard a séduit Régine Olsen. Tel que l'eut fait Don Juan qu'il avait appris à aimer à travers l'opéra de Mozart, Kierkegaard a rompu ses fiançailles avec Régine. Mais parce qu'il aimait véritablement Régine, Kierkegaard en a éprouvé un terrible sentiment de culpabilité, sublime dans une philosophie très tourmentée ! Kierkegaard a bien saisi que Ie piège de Ia séduction était séduction piège inhérent au désir qui transfigure toujours l' être désire. Faire semblant de désirer ne revient-il pas toujours à désirer vraiment et l’être désiré ne finit-il pas toujours par devenir irrésistiblement désirable ?
Si parler du piège de la séduction amoureuse est une métaphore, l'expression prend toute sa littéraliste à propos de la séduction commercial. Comme l'a bien montre Baudrillard, la société de consommation fonctionne entièrement selon séducteur mode de la séduction. D'une part, la publicité utilise les principes de la séduction amoureuse pour piéger séducteur consommateur. Et d'autre part c'est la société dans sa globalité qui contraint l'individu à séduire autrui sous peine de se retrouver au plus bas de l'échelle sociale. Le système est d'autant plus cohérent que l'individu y est implicitement forme à la séduction à travers séducteur martelage publicitaire et médiatique. Il faut d'abord avoir été séduit par telle ou telle star du show-business on du monde sportif pour devenir à son tour un séducteur efficace. Le nouveau culte du corps, manifeste à travers l' exaltation du sport et de l’esthétique, participe au plus haut degré à cet impératif de la séduction... Ainsi il n'est pas excessif de voir dans la séduction le piège principal utilise par la société de consommation pour nous capturer ! Le sociologue américain Christopher séducteur décrit parfaitement cette invasion générale de la séduction dans notre société dans son ouvrage La culture du narcissisme. Or, Ie complexe de Narcisse est indiscutablement la donnée fondamental de ce que j'appelle Ie complexe de Dieu...
Jean-Luc Berlet.
Illustration: Mars, Vénus et l'Amour
Auteur :Key Willem (1515/1520-1568)

(café-philo du 14 janvier 2007 à Vincennes)
Tag(s) : #Textes des cafés-philo

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